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Témoignage sur une rafle
Un des adhérents de notre association, Pierre Frayssines, né
en 1934, viticulteur à la retraite sur les côteaux du Gaillacois,
nous confie un souvenir d’enfance toujours à vif dans sa
mémoire: l’arrestation, dans le village de Brens, d’un
Juif qui était le père d’un camarade de jeux, son
plus proche voisin. Il précise: “je ne peux être affirmatif
sur l’année car j’étais tout de même assez
jeune: sept ou huit ans”.
Durant la Deuxième Guerre Mondiale, j’habitais le
village de Brens avec ma mère; mon père était
prisonnier de guerre en Prusse Orientale. C’est dans ce contexte
que j’ai été le témoin de l’arrestation
des Juifs par le gouvernement de Vichy.
Dans le village, vivaient deux familles de Juifs. L’une
habitait la Grand Rue, approximativement aux environs du n°
8 ou 10 actuel. Elle était composée de deux personnes:
un couple. L’autre habitait au n° 36 de la Contrescarpe
des Tonneliers, une maison qui fait angle avec une petite ruelle.
Elle était composée de quatre personnes: un couple
et deux garçons. L’aîné avait environ
vingt ans et était très rarement à la maison.
Le second avait environ huit ans et était handicapé
des membres inférieurs. Les deux familles ne portaient pas
le même nom, mais étaient apparentées.
Nous habitions juste en face de cette famille à gauche
route de Cadalen au n° 13.
C’est ainsi qu’un matin vers dix heures - je pense
que c’était en 1941 ou 1942 - nous avons vu passer
d’un pas pressé le monsieur qui habitait la Grand Rue.
Il ne courait pas mais se retournait sans cesse et dès qu’il
a été au niveau du pont qui enjambe le ruisseau de
Rieucourt, il est descendu se cacher dans les rives et certainement
plus loin.
Quelques instants plus tard, nous avons vu arriver deux gendarmes
français au 36 de la Contrescarpe. Le premier frappait à
la porte d’entrée, le second se postait à l’angle
de la ruelle ne laissant aucune chance à nos voisins d’échapper
à l’étau qui venait de se refermer. La mère
de famille est venue ouvrir au gendarme. Son mari, beau-frère
du fugitif, tente de s’échapper par la fenêtre
qui donne sur la ruelle. Peine perdue: le second gendarme est là
pour l’arrêter.
On voit bien le zèle qu’affichait la Gendarmerie
Nationale au service des Nazis. Nous n’avons jamais revu ce
chef de famille, emporté très certainement dans les
camps d’extermination.
Ces familles sont ensuite parties du village de Brens pour je
ne sais quelle destination.
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Cette rafle intervient probablement lors des 2 premières années
de “L’Etat Français”.
Xénophobie et antisémitisme
d’Etat - annulation de près de 15 000 naturalisations (22
juillet 1940), 1er Statut excluant les Juifs de nombreuses fonctions (3
octobre)... - sont mis en place dans le cadre d’une collaboration
poussée avec la dictature nazie (entrevue de Montoire sollicitée
par Pétain, 22 octobre) dans l’objectif de placer notre pays
au second rang derrière l’Allemagne dans la construction
d’une “Europe nouvelle”.
Dès le début de l’année
1939, un premier camp pour des “étrangers indésirables”
- des réfugiés allemands et autrichiens antinazis - avait
été mis en place à Rieucros (près de Mende)
par la Troisième République, gangrenée par les racismes
et l’anticommunisme.
Au lendemain du vote des pleins pouvoirs
au vainqueur de Verdun (10 juillet 1940), l’entreprise criminelle
- qui a ses origines dans le climat de confusion des esprits et de déstabilisation
des repères, la crise morale et la profonde division du pays au
cours des années de la Grande Dépression, le traumatisme
de la défaite - est en marche. Après des décennies
de pratique discriminatoire dans nos colonies (Code de l’Indigénat,
1881), la magistrature conjugue sans sourciller droit et antisémitisme
procédant à la dépossession des Juifs et à
leur anéantissement juridique. (cf: Olivier Le Cour Grandmaison:
Coloniser. Exterminer; Librairie Arthème Fayard, 2005)
Les hommes Juifs d’origine étrangère
(célibataires ou “chefs de famille”) sont les premières
victimes des rafles. La police et, dans nos campagnes, la gendarmerie
obéissent aux ordres. L’opinion ne s’émeut guère,
particulièrement dans la zone non occupée, largement “maréchaliste”.
Léon Bérard, ancien Sénateur d’Orthez, ambassadeur
auprès du Saint-Siège s’assure qu’il ne soit
“intenté nulle querelle pour le statut des Juifs”,
le régime est soutenu aussi par des éléments venus
des horizons de la gauche: des pacifistes, certains syndicalistes comme
René Belin...
Des habitants de la célèbre
station thermale de l’Allier - et de la France entière -
réclament aujourd’hui l’abandon de l’expression
usitée “France de Vichy” pour celle de “dictature
du maréchal Pétain” afin de mettre en lumière
la rupture fondamentale avec les idéaux de la Révolution
Française - “avec Pétain, nous sortons du tunnel de
1789” (Charles Maurras) - et l’orientation barbare du régime,
dès juillet 1940, sous la pression de l’extrême-droite
française haineuse et revancharde conduisant à la “complicité
de crime contre l’humanité”.
Après le revirement de l’opinion
à l’égard du régime “Travail, Famille,
Patrie”, suite aux célèbres rafles de l’été
1942 touchant des familles entières (y compris les enfants de moins
de 16 ans non réclamés par Eichmann), des gendarmes ont
aussi pris des risques - Oui, il y a eu le Vel d’Hiv, mais aussi...
la brigade du Malzieu (Lozère) qui sauva 200 Juifs: admirable fut,
dès le début 1943, l’attitude du maréchal des
logis chef Cazals, reconnu comme “Juste” le 20 décembre
1993 et honoré à Albi à titre posthume lors de la
cérémonie traditionnelle commémorant la rafle du
Vel d’Hiv (20 juillet 2003) à l’initiative d’Henri
Steiner.
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Dans le cadre de nos échanges avec d’autres associations
de Sauvegarde de la Mémoire, nous vous annonçons le Troisième
Colloque de Lacaune. Jacques et Eliane Fijalkow et Olivier Héral
représentaient les “Amitiés Judéo-Lacaunaises”
lors de notre Journée de Liaison du 19 juin 2004 (complétée
par la conférence de l’historien Gilbert Badia)
Contacts: Association des amitiés Judéo-Lacaunaises Tél:
05.63.37.00.18 Fax: 05.63.37.15.40
TROISIEME COLLOQUE DE LACAUNE
Samedi 17 et dimanche 18 septembre 2005, salle municipale de Bel-Air
"LES ENFANTS DE LA SHOAH, LEURS ENFANTS ET LES ENFANTS DE
LEURS ENFANTS"
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Samedi 17 septembre
- A partir de 8h45 : accueil des participants
- Matinée : 9h30 - 12h : LES ENFANTS DE LA SHOAH
- 9h30 : séance d'ouverture
- Serge klarsfeld, président de l'association
des fils et filles des déportés juifs
de France
- 10h30 : interventions -
- Rémy Handourtzel, ESC Rouen - "Vichy
et l'école"
- Michel Laffitte, CDJC Paris - "Les enfants
juifs et l'UGIF"
- Martine Lemalet, Paris - "Le rôle de
l'OSE (Organisation de Secours à l'Enfance)
dans le sauvetage des enfants juifs"
- 11h30 : lecture de poème
- "les orties noires flambent dans le vent"
(Claude Vigee), dit par Monique Julien
- Après-midi : 14h-18h30 : LA FRANCE SOUS VICHY
- 14h : interventions
- Alain Michel, université hébraïque,
Jérusalem - "Les éclaireurs israélites
de France au secours des enfants juifs"
- Madelein Comte, professeur Lyon - "Les baptêmes
d'enfants juifs"
- Marcel Frydman, université de Mons - "Les
enfants cachés en Belgique"
- Franck Ristorcelli, Toulouse - "assignés
à résidence : le cas d'Aulus"
- 16h - 16h15 : pause
- 16h15 - 17h15 : La France dans l'après-guerre
et aujourd'hui
- Katy Hazan, historienne OSE - "Les enfants
de Buchenwald"
- Eléonore Hamaïde, univ Paris 13 - "La
représentation des enfants juifs dans la littérature
de jeunesse"
- 17h15 - 18h15 : débat animé par Benoît
Falaize, INRP "L'enseignement de la Shoah : le discours
des déportés des camps de concentration
et sa réception dans les écoles aujourd'hui",
avec Marcel Marcault (Toulouse) et Henri Steiner (Albi)
déportés à Auschwitz
- 20h30 : soiré culturelle
- chorale de Lacaune "Les écoliers à
l'étoile" (paroles et musique de Soizik
Moreau)
- Documentaires présentés par leur auteur
- "Passeurs d'Ariège", film de
Nicole Zimmermann, France 3 Toulouse
- "Les armes de l'esprit", film de Pierre
Sauvage, Los Angeles
- "De Lacaune à Auschwitz, sur leurs
pas", film des élèves de 3°
du collège de Lacaune
- Dimanche 18 septembre
- Matinée : 9h - 12h30 : COMMENT VIVRE APRES CA ?
- Marianne Rubistein, univ Paris 7 "Tout le monde
n'a pas la chance d'être orphelin"
- Yoram Mouchenik, psychologue clinicien à Paris
"De la disparition u deuil chez les orphelins de
la Shoah"
- Pérel Wilgowicz, psychanalyste à Paris
"Les ouragans et le vampirisme de l'Histoire"
- Henri Sztulman, univ Toulouse le mirail "La culpabilité
des survivants"
- Chantal Bordes-Benayoun, IESR Toulouse "La Shoah
dans l'engagement des jeunes séfarades aujourd'hui"
- Après-midi :
- 14h - 15h
- Kerry Bluglass, psychiatre, univ Birmingham "Les
enfants résilients de la Shoah"
- Patrick Cabanel, univ Toulouse le mirail "Des
rafles de 1942 au journal d'Anne Frank et à
la maison d'Izieu : les enfnats juifs dans l'émotion
française face à la Shoah"
- 15h - 17h : témoignages
- René Klein, responsable de la 6° pour
la région toulousaine
- Berthe Burko-Falcman, écrivain
- Edouard Drommelschlager, commerçant
- Denise Epstein, fille d'Irène Némirovski,
écrivain morte à Auschwitz
- Yvette Goldberger, psychologue clinicienne
- Anny Malroux, fille d'Augustin Malroux, député
du Tarn, mort à Bergen-Belsen
- Annie Zylberberg, journaliste
- Nathanaël Fijalkow, étudiant
En parallèle avec le colloque,
- festival de cinéma à l'intention des enfants des
écoles de Lacaune : films consacrés aux enfants
juifs pendant la Deuxième Guerre mondiale
- exposition : portraits d'enfants victimes de la Shoah en Midi-Pyrénées
(FFDJF)
- librairie : vente d'ouvrages sur le thème du colloque
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PS: Nous rappelons à ceux qui n’ont pas encore renouvelé
leur adhésion ou qui voudraient nous rejoindre, que le montant
minimum est de 10 € (adhésion individuelle) ou 15 € (couple
ou famille).
Le chèque peut être adressé à la trésorière:
Mme Jeannine Audoye,
54 Avenue Rhin et Danube 81600 Gaillac
Nous remercions tous ceux qui nous apportent leur soutien. L’intérêt
de chacun d’entre vous est un encouragement au moment où
l’un de nos principaux objectifs est, avec le concours d’autres
Associations, la réalisation d’un Lieu de Mémoire
et de Pédagogie.
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